Au
début de la période historique autour de 3000 av J.-C., on commence à
utiliser pour les funérailles des «récipients» qui sont,
si l’on peut dire, les ancêtres des premiers sarcophages. Ce sont des
caisses, des paniers ou même de grands pots de terre
contenant habituellement nourriture ou bière, dans lesquels le
corps repose en position recroquevillée.
Puis,
ce type de matériel va évoluer vers le sarcophage proprement dit, qui,
à partir de l’âge des pyramides, s’agrandit pour accueillir un corps
allongé.
Il est à remarquer que c’est le recours au sarcophage qui va amener le
besoin de conserver artificiellement le corps par la momification. Alors
que le sable chaud du désert desséchait naturellement le corps, celui-ci placé au
contact de l’air dans le sarcophage subira un processus de décomposition.
Le
sarcophage proprement dit apparaît à l’Ancien Empire.
Ce
mot désigne aussi bien la cuve extérieure que le (ou les) cercueils(s) généralement
en bois destiné(s) à contenir un cadavre. La cuve peut être
rectangulaire avec couvercle plat ou voûté, ou imiter la forme du corps,
on l’appelle alors sarcophage momiforme ou anthropoïde.
Sa
matière peut être très variée: en pierre (calcaire, albâtre, granit, basalte,
quartzite... etc.), en bois, plaquée d’or et
pierres semi-précieuses, en argent, en or. L’or était réservé
aux roi, mais les riches particuliers tentaient eux aussi de l’utiliser.
La cuve extérieure de grande taille était placée dans le caveau lors de
sa construction et c’est au moment
des funérailles que l’on apportait le corps dans son cercueil.
Les cuves rectangulaires de l’Ancien Empire sont parfois dépourvues
d’ornementation.
Le
sarcophage en granit de Khéops ne possède aucune décoration.
Celui
de Mykérinos, malheureusement perdu en mer au large du Portugal, était
un magnifique sarcophage en basalte sans inscriptions, mais orné d’un décor
dit: «en façade de palais» en usage à cette époque pour plus d’un
sarcophage privé.
En exemple, nous avons le sarcophage de Rawer en calcaire peint, Ve
dynastie. Les murs du décor tout à redans surmontés de parties ajourées,
ornées d’oboles de papyrus opposées. Le linteau de la porte centrale
est muni d’une pièce cylindrique qui servait à enrouler le store
fermant l’entrée.1
(redan: terme du lexique archéologique de l’Égypte antique qui désigne
le mode de construction des murs de briques ou de pierres, dans lesquels
les faces extérieures présentent une succession de saillies et de
retraits, évoquant des encadrements successifs de portes emboîtées et
aveugles.)
Ces sarcophages sont bien l’image de la maison, habitation éternelle du
défunt.
A
l’intérieur de ces cuves un cercueil en bois, parfois plaqué d’or,
renfermait la momie.
Bien sûr, tous les sarcophages n’étaient pas aussi somptueux.
Les
fouilles de Schiaparelli à Gebelin ont fourni au Musée de Turin un
tombeau de particuliers anépigraphe daté de la fin de la Ve
dynastie.
Dans
trois chambres funéraires étaient déposés cinq sarcophages. L’un en
pierre contenait un corps enveloppé de bandelettes (l’une des plus
anciennes momies conservées).
Les autres sarcophages étaient en bois. Le premier, en bois de cèdre
avec couvercle en voûte, était contenu dans un autre fait de grosses
planches à peine dégrossies jointes entre elles par des liens de cuir.
Un autre était formé d’un tronc d’arbre creusé assez grossièrement.
D’autre
part, à la fin de l’Ancien Empire,
de courtes inscriptions apparaissent sur les parois des sarcophages
de notables. Ces textes que l’on appellera «Textes des
Sarcophages» reproduisent certains passages des «Textes des
Pyramides» auxquels s’ajoutent des éléments appartenant à des
croyances locales ainsi que des préoccupations plus terre à terre. Au début
du Nouvel Empire ces écrits réorganisés seront à l’origine de la
plupart des formules du «Livre des Morts».
A
la Ve et VIe dynastie, apparaît une technique
d’enveloppement du corps, qui préfigure d’une certaine manière celle
du cartonnage. Sur le corps enveloppé dans les bandelettes était coulé
du plâtre qui recouvrait la face antérieure et les côtés. Cette
technique était réalisée tantôt sur le corps entier, tantôt seulement
pour la tête.2
Au
Moyen Empire, une bande de hiéroglyphes est quelquefois gravée sur la
pierre. Mais depuis la première période intermédiaire, beaucoup de
caisses extérieures sont en bois.
Les deux cercueils emboîtés l’un dans l’autre s’ornent
d’inscriptions et de compositions funéraires (dont le «Texte des
Sarcophages») ainsi que de listes d’offrandes qui étaient
auparavant gravées sur les murs de la tombe.
On
prend conscience de l’isolement de la momie dans sa double enveloppe,
alors on peint sur la face extérieure gauche de la cuve au niveau de la tête
du défunt, celui-ci étant couché sur le côté, deux yeux pour lui
permettre de voir au dehors. Sous les yeux, une fausse porte afin que le
«Bâ» puisse quitter le
corps quand il en a envie. C’est grâce à son «Bâ» qu’un mort peut aller et venir dans, mais aussi hors de sa
tombe et c’est toujours grâce à son «Bâ»
qu’il
peut animer la statue funéraire.
Le
sarcophage du Général Sépi donne un exemple de décoration intérieure
de cette époque.
Frise d’objets nécessaires à la vie dans l’au-delà : aliments,
armes, bijoux, pièces de vêtements, pots d’onguents, d’huiles parfumées,
sachet de fard vert, disposés sur deux tables et identifiés par une
ligne de texte.
La moitié inférieure du panneau porte des chapitres des «Textes des
Sarcophages». Ce sont de longues formules écrites en hiéroglyphes
cursifs, disposés en colonnes souvent munies de titres (formules
d’entrer dans le Bel Occident, transformation en crocodile... etc.). Ces
formules donnent des indications sur l’au-delà, ainsi que sur tout ce
qui est nécessaire au défunt pour y vivre.
Ces
textes ne sont pas réservés aux rois, mais apparemment destinés à
tous.
Sur le fond de la cuve, le «Livre des deux chemins», véritable «carte»
de l’autre monde.
A
la XVIIe dynastie, sous le règne des princes Antef, on voit
apparaître des types de sarcophages anthropomorphes ayant sur le dessus
la représentation de la déesse vautour Nekhbet, protégeant le mort de
ses deux ailes étendues, on les appellera les «emplumés».
Ces sarcophages ne sont plus des cercueils intérieurs; ils reflètent une
nouvelle coutume, le mort n’est plus couché sur le côté, mais sur le
dos. Ce type devient la règle.
Avec
le Nouvel Empire s’accroît la richesse de la décoration et l’on voit
apparaître à la tête et au pied du cercueil, entourant le mort de leurs
ailes, les déesses protectrices Isis et Nephthys. C’est surtout de
cette époque que datent les cercueils anthropoïdes. Ils sont maintenant
au nombre de trois épousant étroitement la forme du cadavre emmailloté.
Les véritables gaines de momies sont recouvertes d’or (Toutankhamon) ou
plus simplement vernissées. Elles sont faites de bois, d’épaisseurs de
papyrus collés ou d’étoffes imprégnées de stuc.
Ces caisses momiformes sont, le plus souvent, de grande taille et sont
contenues dans des cuves de pierre plus gigantesques encore, mais toujours
parallélépipédiques.
Faisons
une incursion dans la Vallée des Rois, nécropole des rois de la XVIIIe,
XIXe et XXe dynasties.
A
la XVIIIe dynastie, la plupart des sarcophages royaux parallélépipédiques
sont en quartzite rose ornés de reliefs et textes peints en bleu (résurrection)
et jaune (divinité et incorruptibilité).
On peut ainsi admirer dans leurs tombes les cuves de Thoutmosis III,
Amenhopet II (seul pharaon, avec Toutankhamon, que l’on retrouvera dans
son sarcophage d’origine), Thoutmosis IV... etc. En effet, la plupart de ces
puissants souverains dont les tombes étaient soumises au pillage, furent
re-enterrés à la sauvette, à l’intérieur d’humbles sarcophages de
bois, dans une cachette connue des seuls prêtres.
Sous
le règne de Thoutmosis IV, les sarcophages royaux adoptent la même décoration
que ceux des particuliers, des bandes imitant les bandelettes des momies
entouraient les côtés et le couvercle, délimitant ainsi des espaces
pour les représentations divines.
Avec
la découverte de la tombe de Toutankhamon, on put enfin se rendre compte
de ce que représentait en somptuosité l’inhumation d’un souverain égyptien.
Dans l’habituelle cuve en quartzite rose, recouverte d’inscriptions et
ornée à chacun de ses angles d’une très belle image en haut relief
d’une déesse étendant, en un signe protecteur, ses bras ailés, trois
sarcophages momiformes étaient emboîtés.
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Le
premier est à l’image d’Osiris, mains croisées sur la poitrine,
entouré des bras emplumés d’Isis et Nephthys.
Le deuxième est également plaqué d’or et couvert d’incrustations de
pâte de verre et entouré des ailes tendues de Nekhbet et Ouadjet.
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Le
deuxième cercueil est long de 2,04m, le bois dont il est fait n'a
pas encore été identifié. Toute la surface du cercueil est
recouverte d'une feuille d'or. Le
troisième sarcophage est en or massif entouré des ailes tendues de Nekhbet et
Ouadjet. |
Certaines cuves ont été enlevées de leurs tombes pour enrichir les musées
étrangers où, contrairement au sort réservé à celle de Mykérinos,
elles sont bien parvenues, mais parfois séparées de leurs couvercles qui
sont hébergés dans d’autres musées, quand ils n’ont pas été détruits
par les voleurs.
Ces
cuves, pour la plupart, ont été récupérées lors de campagnes de
fouilles à l’époque où rien n’avait encore été fait pour la
sauvegarde des antiquités dans leur propre pays.
C’est entre autres le
cas des sarcophages de Séthi Ier et Ramsès III, faisant partie de la
collection Salt.
Henri
Salt, consul d’Égypte, fouillait pour son propre compte, aidé par
Belzoni, et il avait constitué de belles collections qu’il vendait au
plus offrant.
En
Égypte, les animaux sacrés bénéficient aussi à leur mort de la
momification et peuvent donc être conservés dans des sarcophages à leur
taille. Le plus souvent, ce sont des boîtes reprenant plus ou moins
grossièrement la silhouette de l’animal. La plupart sont en bois et ne
portent pas d’inscription.
Mais
le musée du Caire possède un sarcophage de chatte digne de figurer sous
cette rubrique. Datant de la XVIIIe dynastie, il provient de
Memphis.
Il
est doublement remarquable, car il est en calcaire et couvert de textes et
représentations. Il a l’aspect d’un coffre à canopes. Le maître de
la chatte serait un prince Thoutmosis, fils d’Amenhopet III, qui dût
aimer très fort son animal familier pour lui offrir un si beau cercueil.
Toutes les représentations habituelles figurent sur le sarcophage, les déesses
Isis et Nephthys représentées agenouillées sur le signe de l’or.
Quatre colonnes de texte, gravées à cheval sur le couvercle et la cuve
mentionnent les quatre fils d’Horus. A leur protection s’ajoute celle
de Nout.3
Enfin,
dans le domaine du colossal, on ne peut passer sous silence la nécropole
des taureaux Apis à Saqqarah, découverte par Mariette le 12 novembre
1851.
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Là, des chambres disposées en quinconce, le long d’un couloir
souterrain, contiennent vingt-quatre énormes sarcophages monolithiques.
Ils sont en granit rose, basalte ou calcaire, hélas vides depuis
longtemps. Leurs dimensions sont cyclopéennes: 4 à 5 mètres de long, 3
à 4 mètres de haut, 2 à 3 mètres de large.
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Le poids de l’un d’eux,
muni de son couvercle, a été évalué à 69 tonnes. Ils sont sans
inscriptions, à l’exception de trois qui portent les noms d’Amisis,
Cambyse et d’un «obscur» Khababach.
Cette
nécropole a été utilisée du Nouvel Empire à l’époque ptolémaïque.
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La
suite du déblaiement a permis de mettre au jour dans un autre niveau, un
souterrain plus petit, aux chambres mal creusées, mais dans lesquelles on
trouva vingt-huit momies d’Apis. Elles reposaient dans leurs sarcophages
de bois. Le corps du prince Khaemouaset, fils de Ramsès II, grand prêtre
de Ptah qui avait les Apis pour emblème, reposait lui aussi dans le
souterrain. Les taureaux étaient richement dotés de bijoux et
d’amulettes... et excepté deux tombes d’Apis intactes, toutes les
autres avaient été pillées.
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Le
Nouvel Empire se termine, nous entrons dans la troisième période intermédiaire
qui est parfois rattachée à la Basse Époque, avec la XXIe
dynastie.
A partir de cette dynastie, il y a une évolution parallèle de la tombe
et du sarcophage.
La décoration de la tombe disparaît et passe sur le
sarcophage qui sert également de support au «Livre des Morts»,
issu des «Textes des Sarcophages». Des livres entiers avec
leurs vignettes sont gravés sur les parois d ’énormes cuves de
pierre. C’est aussi le début de l’émiettement du pouvoir. A cette période,
l’Égypte est partagée entre des rois à Tanis et des rois prêtres
d’Amon à Thèbes.
A
Tanis, capitale de la XXIe dynastie, l’égyptologue français
Pierre Montet en 1939-40 découvrit entre autres trésors la tombe de
Psousennès Ier.
Le
roi reposait dans trois
sarcophages.
- Le premier usurpé est en granit rouge. Ce sarcophage avait été
utilisé 170 ans plus tôt pour les funérailles de Merenptah, le
successeur de Ramsès II.
- Le deuxième sarcophage momiforme en granit noir était destiné
primitivement à un noble de la XIXe dynastie qui n’a pu être identifié.
- Le troisième est en argent massif. Il renfermait la momie qui
portait un masque funéraire en or.
Le
couvercle du sarcophage en argent massif représente le roi, visage
souriant, corps serré dans un maillot de bandelettes, bras croisés sur
la poitrine tenant les sceptres royaux. Pas d’incrustations de pierres
ou de pâtes de verre, tout le décor est gravé dans l’argent. Deux
colonnes de textes descendent jusqu’aux pieds. C’est un double appel
du roi à sa «mère Nout» pour qu’elle étende ses ailes
sur lui.
Le
roi Chéchonq Ier, enterré dans le vestibule de la tombe de
Psousennès, reposait dans un étrange sarcophage d’argent en forme de
momie de faucon.
Avec
le sarcophage de Pétosiris nous entrons dans l’époque ptolémaïque.
Pétosiris
était grand prêtre de Thot avant la conquête d’Alexandre. Son
sarcophage a été trouvé à Tourna el- Gebel, nécropole de l’ancienne
Hermopolis..
Dans
une lourde cuve de pierre, deux cercueils étaient emboîtés. Le premier
était en sycomore, recouvert de stuc jaune et tout pourri. Le deuxième
en bois de pin sombre intact et très bien travaillé. Il avait «la
magnificence d’un cercueil de roi» dit G. Lefebvre qui dégagea la
tombe.
Son
couvercle momiforme porte sous un signe de ciel de couleur lapis, cinq
longues colonnes de hiéroglyphes aux couleurs d’autant plus éclatantes
que le fond patiné est presque noir.
On pourrait croire à des
incrustations de pierres semi-précieuses de toutes sortes, mais il
s’agit seulement d’éléments de verre coloré, utilisés selon les
conventions habituelles et imitant lapis-lazuli, cornaline, jaspe, ivoire,
émeraude.
Mais
plus on va s’acheminer vers la fin de l’histoire égyptienne les
sarcophages vont privilégier la décoration au détriment des hiéroglyphes.
Comme nous l’avons vu, ce type de sépulture avec plus ou moins de
variantes, s’est poursuivi de l’aube de l’histoire égyptienne à
l’époque tardive et ensuite à l’époque grecque et romaine, pour le
plus grand bonheur des amoureux de cette civilisation.
Et
pour terminer - si nous rêvions un peu - à quand la découverte du
tombeau d’Alexandre ?
Pour
l’Égyptien, le sarcophage représente une maison, la maison dans
laquelle il va vivre une vie nouvelle et si possible entouré du mobilier
et des objets qui lui appartiennent.
Cette
habitation est à l’image du monde dans lequel il a vécu, le couvercle
représente le ciel, le fond du sarcophage représente la terre et les
quatre planches latérales figurent les quatre horizons.
Le
sarcophage est en principe orienté.
Le
panneau Nord est en relation avec les déesses Nephthys et Neit, le
panneau Sud avec Isis et la déesse scorpion Selkit.
Le mort était couché tête au Nord, le visage regardant vers l’Est.
Cette coutume fut par la suite abandonnée et le défunt se retrouva couché
sur le dos.
Ainsi, le mort qui est un Osiris se trouve entouré des membres de sa
famille tout en regardant vers le lieu où se lève le soleil. Les décorations
intérieures et extérieures des sarcophages évolueront avec le temps
ainsi que les textes.
A
ce jour, 1185 textes ont été recensés. Ils sont inscrits presque
uniquement en colonnes verticales et à l’encre noire. L’intitulé des
colonnes est souvent écrit à l’encre rouge. Certains textes et
certaines scènes se retrouvent dans toutes les régions d’Égypte,
d’autres uniquement réservés à une contrée.
Le texte 395 raconte la «solarisation» du mort, le 225 rend au
mort l’intégrité de son corps et l’usage de tout ce qui lui est
indispensable. Les textes 154 à 169 affirment la connaissance par le mort
des mystères des lieus saints et de leur âme «Bâ». D’autres sont de véritables chapitres alimentaires et
doivent permettre au mort de participer aux nourritures divines.
Les
chapitres couvrant les sarcophages se décomposent en différents schémas.
Certains chapitres sont une invocation du mort pour la restitution de ses
fonctions corporelles. D’autres sont pour l’ouverture du couvercle
afin de s’élever au ciel dans sa sortie au jour. D'autres donnent la
possibilité de sortir par la fausse porte pour prendre la nourriture déposée
sur la table d’offrande. On y trouve aussi la campagne des félicités,
sorte de Champs Elysées où le mort a tout à sa disposition.
Un
deuxième schéma comprend les formules mentionnant le jugement des morts
devant le tribunal de l’au-delà. Ces formules ont pour objet de
proclamer la victoire sur les ennemis, victoire considérée comme
permanente et définitive. Il y a ensuite des formules de libations en
l’honneur du mort, des formules de purification et de glorification qui
doivent laver et rajeunir le mort en prélude au réveil.
Le mort est représenté comme étant Osiris se levant comme un soleil. Il
est identifié au créateur à qui tout appartient. Il est devenu un dieu
parmi les dieux. Il a échappé à toutes les embûches, même les plus
redoutables et doit montrer qu’il connaît tous les éléments, donc
qu’il a été initié puisqu’il est à présent d’essence divine.
Même
si certains textes sont obscurs à notre entendement, l’ensemble fait
apparaître le triomphe de la Vie sur la Mort.
Les formules des textes commencent le plus souvent par «dire
(prononcer) les paroles». Ces introductions aux formules (présentes
sur le sarcophage du Muséum) donnent aux «textes» une
notion d’oralité beaucoup plus importante que la notion de lecture
silencieuse.
Monsieur
Bernard Mathieu, Maître de conférence en égyptologie, Directeur de l'I.F.A.O,
dans la revue
trimestrielle (N°12) Égypte, Afrique et Orient du Centre Vauclusien d’égyptologie4
donne une très bonne définition des «Textes des Pyramides»,
définition qui reste valable pour les «Textes des Sarcophages».
«Dans cette abondance de formules imprécatoires, rituelles,
prescriptives, il n’y a guère de place pour l’écrit: c’est
l’univers sonore de l’oralité et non celui, silencieux, du
scriptural. Il s’agit d’entendre, et non de lire, comme le souligne
l’introduction de chaque formule : prononcer
les paroles. Pour résumer, si l’on peut légitimement douter que le
terme de «Pyramides», dans la désignation «Textes des Pyramides»,
soit bien adéquat, il faut avouer que celui de «Textes»
est encore moins opportun. Cette dernière constatation n’est pas
anodine, car on n’aborde pas un texte comme une parole, l’écrit comme
l’oral: le premier ne se développe que sur deux dimensions, tandis que
le second emplit un volume».
Le
mort est identifié à Osiris, à Rê, il s’assimile au Soleil qui revit
chaque matin, ce qui est un gage de vie pour des millions d’années.
L’Égyptien voyait l’expression même de la divinité dans les phénomènes
naturels, toutes les forces de la nature soumises à un rythme éternellement
renouvelé dont on ne concevait pas d’arrêt si l’ordre et la règle
étaient respectés et si l’harmonie était maintenue.5
L’Égyptien
employa différents mots pour écrire cet habitacle qui devait renfermer
son corps.
Nous
en citerons trois qui résument en partie tout ce qui vient d’être dit.
Le déterminatif de ce mot dj.t, que nous traduisons par
sarcophage, représente une branche ramifiée.
Il est également employé dans les noms d’objets en bois.
Le genre de ce mot est féminin.
Dans
la bibliographie d’Ouni, fonctionnaire des Pharaons Téti, Pépi Ier
et Mérenré (VIe dynastie), le nom désignant le cercueil lui
donne toute sa valeur symbolique:
«Ma
majesté m’envoya à Ibhat pour transporter le cercueil des vivants (qui
est) seigneur de la vie, avec son couvercle...»
Ouni
tailla le sarcophage destiné au Pharaon Mérenré dans les carrières de
Nubie, ce sarcophage fut retrouvé entier dans la Pyramide de Mérenré à
Saqqarah.
Donc
ici le sarcophage est appelé: nb-ankh,
«Seigneur de vie».
Prés
de la pyramide de Téti (VIe dynastie) à Saqqarah se trouve le
mastaba «d’Ankhmahor dont le nom est Zézi». Sur son cercueil Zézi y
fit inscrire des textes et l’une de ces lignes dit:
"...vous
placez pour moi ce couvercle de ce cercueil sur ma mère du mieux que vous pouvez comme ce qui doit être accompli par vous (pour) un
esprit capable..."6
Ici
la cuve du cercueil est considérée comme la mère du défunt. Cette même
formule est inscrite sur le cercueil de Khentika, fonctionnaire important
de Pépi Ier, cercueil retrouvé dans le mastaba de Khentika
dit Ikhekhi.
Trois
noms, trois dénominations pour un même objet :
- il est seigneur (maître) de vie
- il est aussi la mère, celle qui donne la vie
- le troisième terme -dj.t- de genre féminin possède le déterminatif
d’une branche de bois.
Au
Moyen Empire le sarcophage est assimilé à la barque puisque ses longs côtés
Ouest et est sont appelés
respectivement parois de «bâbord» et de «tribord».
Cette appellation est à mettre en rapport avec la mort d’Osiris et
l’inondation qui «noie» la terre d’Égypte.7
L’étymologie
du mot sarcophage vient du grec «sarkophagos», nom d’une
pierre avec laquelle on fabriquait des cercueils parce qu’elle avait la
propriété de consumer rapidement la chair. Il y a fort à parier que
cette traduction ne conviendrait pas aux anciens égyptiens, tellement
elle est à l’opposée de l’idée qu’ils se faisaient de cet objet.
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