Cône funéraire avec un
cartouche.
Ces objets de terre
cuite, normalement de forme conique, possèdent à sa base une estampille
composée de textes hiéroglyphiques à caractère funéraire. Les cônes
funéraires égyptiens sont réalisés en terre, modelés à la main, et
postérieurement cuits dans un four. De très nombreux cônes funéraires
ont été découverts dans la région Thébaine, et c'est Jean-François
Champollion qui le premier mentionna ces objets et tenta d'expliquer la
signification. Ces cônes, trouvés en grande quantité, furent l'objet de
curiosité et de spéculation de la part des premiers égyptologues, au
milieu du siècle dernier, pour trouver l'utilité et la signification;
discutions qui sont encore loin d'être résolues avec satisfaction. Comme
déjà mentionné les cônes de terre modelés à la main avaient généralement
une forme conique avec une base circulaire. Mais l'on trouve aussi des
cônes, moins nombreux, qui ont une forme pyramidale avec une base carrée
ou rectangulaire. La
taille des cônes oscille de 10 à 35 cm de longueur, avec une base
comprise entre 5 et 10 cm de diamètre ou de côté. Les textes
hiéroglyphiques sont inscrits en relief grâce à une estampille réalisée
lorsque la terre était encore humide et avant la cuisson. Le sceau
devait être en bois ou en pierre, il servait à estampiller une multitude
de cônes lorsque la production était nécessaire. L'on a retrouvé une
multitude de cônes, avec une estampille identique, appartenant à un même
personnage, et réalisés grâce au même sceau. La majorité des cônes
présentent un aspect "vermoulu" sur les faces externes, l'intérieur
étant de couleur noire. La variation des couleurs des cônes funéraires
provient des hautes températures irrégulières lors de la cuisson. Les
formules funéraires en vigueur dans les textes cohabitent avec le nom et
les titres des nombreuses personnes dont l'on a découvert la tombe, ou
bien grâce à d'autres documents, l'on sait qu'elles furent enterrées
dans la nécropole Thébaine de la XVIIIème à la XXVIème dynastie.
L'on a découvert des cônes funéraires, en plus petite quantité, de forme
rectangulaire ou triangulaire et portant plusieurs estampilles. Ces
objets semblaient avoir été utilisés pour intégrer une construction. De
nombreux cônes, estampillés de textes hiéroglyphiques, conservent des
restes de peintures.
Normalement, la part qui correspond au tronc était peinte de couleur
blanche, et la partie circulaire de la base, de couleur rouge. Les
inscriptions estampillées sur la base des cônes sont, dans la majorité
des cas, de caractère funéraire. Les textes se présentent en colonnes ou
lignes horizontales inscrites dans un cercle. Dans la majorité des cas
ils se lisent de gauche à droite et de haut en bas. Normalement ils
présentent un texte d'introduction qui comprend une formule funéraire du
type "le vénérable devant Osiris" ou bien il mentionne le défunt "du nom
d'Osiris". Le texte se poursuit avec les titres et le nom du défunt pour
se terminer par l'épithète funéraire" le justifié". Il existe de
nombreuses exceptions en référence aux différents types d'inscriptions:
par la formule utilisée, par la quantité des colonnes ou lignes de
textes, par leurs dispositions ...etc. Il arrive que la formule
funéraire soit absente et elle est remplacée par une prière au soleil,
l'on peut trouver aussi uniquement les titres et le nom du défunt.
Quelques estampilles présentent, en supplément des textes
hiéroglyphiques, une image du défunt dans la position de prière ou bien
assis devant une table d'offrandes, seul ou accompagné de son épouse.
Dans quelques occasions apparaît une représentation de la barque solaire
ou d'autres symboles funéraires. Le nombre des colonnes de textes
fluctuent entre un maximum de sept et un minimum de un. Les textes
inscrits, en lignes horizontales, oscillent entre deux et neuf. Plus de
60% sur la totalité des cônes présentent les textes en trois ou quatre
colonnes ou lignes, et souvent l'on trouve entre elles un trait
vertical, ou horizontal, de séparation. Quelques cônes présentent des
textes inscrits d'une manière irrégulière quand à la disposition et à la
lecture. Pour Jean-François Champollion les cônes étaient une espèce
d'étiquette funéraire et ils avaient la même utilité que les "bouts" de
bois qui se trouvaient dans les sarcophages ou momies à l'époque
grecque. Pour Auguste Mariette le cône évoque le signe hiéroglyphique
utilisé pour écrire la parole "offrande ou donner", il mentionne
également que de nombreuses fois l'objet est entouré d'une poussière
blanche semblable à de la farine, ce qui donne une ressemblance du cône
avec le pain d'offrande, mais il doute que la seule fonction symbolique
soit celle-là. Selon Maspero les cônes étaient déposés en terre devant
l'entrée de la tombe et ils étaient en relation avec sa forme externe
qui était une reproduction en terre des pains coniques d'offrandes.
Maspero rejoint ainsi l'opinion de Mariette. Flinders Pétrie, lors du
congrès de Leiden, s'en remet à l'opinion de Maspero et mentionne qu'il
s'agit bien de simulacre de pain d'offrande. L'égyptologue Français
Daressy, dans l'introduction de son "Recueil des cônes funéraires",
repasse en revue les différentes théories en vigueur à cette époque. Il
y expose son opinion personnelle: "cette action, de déposer des cônes
(ou pierres) devant l'entrée des tombes, rejoint les coutumes de
certains peuples qui disposent des pierres à côté des tombes comme pour
signaler sa visite au défunt, une sorte de "carte de visite" que les
parents ou amis attestent au défunt". Bernard Bruyère mentionne que les
cônes funéraires, de terre cuite, sont les simulacres d'un pain
d'offrande spécialement destiné au dieu Osiris, ils confèrent le même
ordre d'idée magique que les ouchebtis. Pour Bernard Bruyère ce
phénomène est uniquement thébain. En 1926 Bernard Bruyère poursuit les
fouilles à Deir el-Medinet et il trouve un bloc de terre peint de
couleur rouge, taillé en biseau diagonal avec quatre estampilles.
Bruyère mentionne que ces blocs pouvaient servir de pierre d'angle pour
délimiter l'aire de la tombe. Sur les écrits des fouilles de Bruyère à
Deir el-Médinet en 1926 page 54, il mentionne: "Pavés et cônes
funéraires sont des objets de même espèce et font partie les uns et les
autres d'offrandes alimentaires en simulacre.... Si le cône blanc est un
pain, le pavé peut-être soit un morceau de viande, à cause de sa forme
et de sa couleur rouge, soit une tranche de gâteau arrosée d'une
libation..." Les cône funéraires, avec inscriptions, apparaissent sous
la XVIIIème dynastie avec le règne d'Ahmosis. Dès l'époque de
Thoutmosis Ier l'on en trouve divers exemplaires. Exceptés la
période amarnienne, les cônes seront utilisés jusqu'à l'époque
ramesside, puis ils vont complètement disparaître sous les dynasties
suivantes. L'on retrouve les cônes funéraires dans la zone de l'Assassif
sous les XXVème et XXVIème dynasties, ils
décoraient les tombes des notables de l'administration thébaine. A
partir de cette période les cônes funéraires disparaîtrons totalement
des tombes de Thèbes. Des cônes funéraires, sans inscription, furent
trouvés dans des localités éloignés de Thèbes: Naga el-Deir, Abydos,
Armant, El Rizeigat, Et Tod et Guebelein. Georges Daressy parle d'un
voyage d'inspection en l'an 1889 avec le Directeur du Service des
Antiquités d'Égypte, il écrit: "...j'ai ramassé dans ce cimetière un
certain nombre de cônes funéraires semblables à ceux de Gournah, mais
sans inscription, déjà à Abydos j'en avais remarqué quelques-uns,
l'usage de cet objet n'est donc pas spécial à la région de Thèbes". Des
cônes avec inscriptions proviennent aussi de zones éloignées de Thèbes:
Ed Der, situé à 7 km au Nord d'Esna. Georg Steindorff, durant les
fouilles en Nubie au cours des années 1929 et 1934, a découvert dans la
tombe S65 de la nécropole d'Antiba, un cône dont l'estampille donne le
même personnage que des cônes de Thèbes. Quelques cônes funéraires
proviennent de la région de Tombos située au Nord de Kerma dans la Nubie
Soudanaise. C'est la première fois que l'on découvrit des cônes
funéraires dans une région aussi éloignée de Thèbes. La quasi totalité
des cônes funéraires des nécropoles de Thèbes ont été trouvés en dehors
de leur lieu d'origine. Ils étaient disséminés dans une grande zone de
la montagne thébaine. En comparaison l'on a très peu d'exemplaires
trouvés lors des fouilles qui appartiennent au propriétaire de la tombe
attenante. |
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